jeudi 18 août 2011

Faire avancer le Québec


Le Québec traverse une période intense de remise en question. Une crise de confiance grave qui induit de douloureuses prises de conscience.

Elle se manifeste à travers les fortes turbulences au sein des milieux politiques, par l’énorme pression qu’exercent sur des finances publiques déjà fragiles les besoins urgents d’investissements dans les services publics et les infrastructures, dans les constats troublants sur la transparence et l’intégrité d’une gouvernance et d’élus perméables aux influences d’intérêts éloignés du bien commun, à travers les problèmes collectifs, dont la crise identitaire, qu’exacerbent les médias dans leur couverture de l’actualité. Il est évident que le Québec traverse une crise de confiance majeure qui nous forcera tôt ou tard à faire des choix fondamentaux pour continuer d’avancer.

Heureusement, cette crise est ouverte, reconnue et débattue dans l’espace public québécois. Il s’agit là d’un signe très rassurant d’une société globalement saine, vivante et démocratique. Cela ne garantit pas, bien sûr, qu’elle réussira à passer au travers ou qu’elle en sortira indemne.

En raison des clivages qui caractérisent toute société, tout un chacun a tendance à percevoir et résoudre la crise partiellement et donc partialement, à sa façon, selon son milieu d’intérêt, son secteur, son domaine d’expertise, ses opinions politiques. Si plusieurs des aspects qui provoquent et alimentent la crise sont endogènes, propres à ce qu’on appelle le modèle québécois, d’autres par ailleurs sont liés aux multiples facettes de la mondialisation. Tout aussi importants, ils sont surtout débattus et traités par le gouvernement canadien, souvent en contradiction avec les intérêts québécois. Pour réagir efficacement aux influences extérieures, le Québec est souvent impotent car il n’a pas développé les réflexes d’un pays souverain.

La gravité de la situation interpelle donc tous les acteurs sociaux, particulièrement nos leaders politiques de toute appartenance et idéologie. Malheureusement, empêtrés dans leurs conflits internes et en lutte contre leurs adversaires, divisés par leur recherche du pouvoir ou simplement accaparés par leur charge de travail, nos élus peinent pour la plupart à élever leur esprit à une hauteur suffisante pour qu’apparaissent les intérêts supérieurs du Québec. Le sens de l’histoire les y convie pourtant. Ils doivent réagir. L’heure est à la responsabilisation dans le nous collectif. Ce nous collectif, à travers le peuple, doit se nommer, exprimer ses besoins, faire entendre ses aspirations, se tourner vers l’avenir.

Par quels moyens ? Que ce soit par une large consultation populaire, des états généraux, une commission parlementaire itinérante, une commission d’enquête, le moyen est finalement secondaire s’il est efficace. Ce qui importe c’est une démarche qui nous mobilisera tous ensemble dans une attitude libératrice vers l’action collective créatrice. Sur la base d’un consensus : le Québec doit faire un grand pas en avant qui déterminera son avenir.

Justement, dans quelle direction le Québec doit-il avancer ? Comme toutes les communautés dans le monde, il doit faire ses choix à partir de deux axes nécessairement interdépendants, complémentaires et consécutifs. Celui qui s’inscrit avec cohérence dans son histoire, qui lui donne l’indispensable perspective, et celui qui garantit sa cohésion dans l’avenir, qui ouvre une prospective rassembleuse. Inévitablement, le débat collectif portera sur les routes qu’il doit emprunter et les destinations qu’il doit rechercher. Je propose la carte routière suivante…

Premièrement, tout cheminement collectif doit s’articuler autour du maintien, de la consolidation et du renforcement de la société francophone (et non pas uniquement la langue) qu’est le Québec. Cela implique la reconnaissance explicite d’un tronc commun identitaire qui puise ses racines dans l’histoire, qui a pris un caractère distinctif et exclusif dans son développement endogène, lui-même enrichi de l’apport extérieur.

Deuxièmement, cette société particulière se caractérise par une présence influente du seul état francophone d’Amérique, dont le gouvernement exerce un rôle rassembleur et interventionniste dans les principaux secteurs de l’activité collective, la culture, l’éducation, les affaires sociales et l’économie en étant les plus importants.

Troisièmement, cette société reconnait la contribution historique et le rôle social de la communauté anglophone québécoise et tient compte de l’environnement anglo-saxon de l’Amérique du Nord.

Quatrièmement, cette société met l’emphase sur la répartition de la richesse, la laïcité de la sphère civique, la liberté religieuse, l’égalité entre les hommes et les femmes.

Cinquièmement, cette société accorde une importance primordiale à l’exploitation équilibrée et au développement harmonieux de son territoire et de ses ressources.

Sixièmement, cette société s’approprie et développe les instruments collectifs pour progresser, poursuivre sa route, et participer selon ses intérêts et ses valeurs aux affaires mondiales.

Septièmement, cette société s’ouvre sur l’extérieur et accueille le monde dans un esprit de partage, de fraternité, de justice et d’évolution de l’humanité.

Voilà une feuille de route qui peut nous amener bien loin. Jusqu’à la souveraineté ?

Pas nécessairement si nos voisins canadiens, tout d’un coup et de façon inattendue, comprenaient ce que, pour une bonne fois, nous exprimerions clairement. Si nécessaire dès lors qu’ensemble, lucidement, avec sagesse et fierté, nous décidions de nous accomplir pleinement.


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